Les jardins d'Hélène

Laisser les cendres s'envoler - Nathalie Rheims

21 Août 2012, 07:16am

Publié par Laure

 

Premières phrases :

 laisser les cendres s'envoler« J'ai perdu ma mère. Elle a disparu il y a plus de dix ans. Ma mère est morte, je le sais. Mais, lorsque j'y pense, je ne ressens aucun chagrin, pas la moindre émotion. Tout reste plat comme une mer gelée, pas un seul petit frémissement à la surface de l'eau. Quand je pense à elle, il ne se passe rien. »

Alors qu'elle était encore adolescente, la mère de la narratrice a quitté le foyer pour suivre un amant qui l'a envoûtée tel un gourou, artiste qui l'a manipulée pour utiliser sa fortune. La narratrice en est profondément marquée, ne comprenant pas l'abandon de sa mère envers elle. Une mère peut-elle ainsi laisser sa fille ? L'amour maternel n'est-il pas inconditionnel ? Il lui aura fallu des années, longtemps après sa mort, pour revenir sur ces années, sa douleur et sa révolte tues, conformément aux règles familiales où le silence est roi.

Sentiments ambivalents sur ce court roman aux accents profondément autobiographiques (l'est-il?) car il m'a été difficile de rester en empathie avec la narratrice qui si elle s'exprime enfin (et définit ainsi le rôle de l'écriture dans sa vie), reste néanmoins dans un discours (trop ?) lisse, fade, conventionnel. Trop de retenue, comme si elle ne livrait pas totalement ses sentiments profonds. Et quid du père trop absent qui disparaît quasi du récit, de ses relations avec lui ? Certains passages retournent même la bonne volonté du lecteur : la pauvre petite fille riche ne parvient plus à émouvoir, même si à d'autres moments on la sent détachée de tout cela. Même si l'on n'est pas forcément plus heureux dans une grande famille bourgeoise, il est difficile de pleurer à la description des clochettes pour appeler les domestiques qui viendront vous servir le thé. Les passages relatifs au vide intérieur de la jeune femme, son rapport à la nourriture, sont bien plus touchants et justes. Mais la violence et la souffrance restent trop intérieures, muselées dans ce carcan familial trop bien élevé que les années ne parviennent que trop peu à desserrer.

Il faut reconnaître néanmoins à Nathalie Rheims une très belle écriture, sobre, classique, sans emphase. Et la beauté du titre, pour se libérer de ce trop grand poids subi à un moment de la vie. Faire la paix, au moins avec soi-même.

 

 

éd. Léo Scheer, août 2012, 254 pages, prix : 19 €

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Crédit photo couverture : ©éd. Léo Scheer

 

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K
<br /> J'ai un assez mauvais souvenir d'un roman de l'auteur et ça semble être encore le même genre... du coup, je pense bien passer mon tour. <br />
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